by Faloukou Dosso
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par Faloukou Dosso

Résumé :
La reconstruction post-conflit est une nouvelle possibilité d’effectuation qui s’offre à l’Afrique en vue de la sortir de la spirale de conflits. Il est question de faire le diagnostic de son mal et d’aborder son processus de reconstruction en optant pour une lecture habermassienne de la reconstruction post-conflit. Avec Habermas, les balises de mondialisation et de globalisation sont établies favorisant la naissance d’un Africain nouveau, dans un espace public dynamique, qui prendra conscience du rôle à jouer dans le développement-progrès de son continent.
Abstract :
The post-conflict reconstruction is a new possibility for Africa to realize itself in order to go out of the spiral of conflict. It’s time to make the diagnosis of what is wrong in order to start its process of reconstruction by making an habermassian analysis the post-conflict reconstruction. With Habermas, the universal bridges are set up. This drives to the birth a new African in a dynamic public space, who will be aware of the role to play in the progress-development of his continent.
Mots-Clés :
Communication, Discussion, Espace public, Éthique de la discussion, Argumentation.
Keywords :
Art, aesthetics, industrial society established, critical theory- negative, desublimation, positive.
Introduction
Les questionnements sur le rôle du continent africain en vue de déterminer sa place dans un contexte de mondialisation et de globalisation motivent un questionnement encore plus fondamental : Comment l’Afrique peut-elle se reconstruire véritablement avec la ferme volonté de se développer à l’africaine ? Les conflits qui la traversent, dictent-ils des solutions à l’africaine, africaines ou universelles ? Quelle serait la pertinence des expressions à l’africaine et africaines dans une lecture habermassienne de la reconstruction post-conflit ?
Le vocable reconstruction vient du verbe reconstruire qui, à son tour, est extrait du verbe construire. Du latin construere, dérivé de struere, construire signifie disposer, bâtir et édifier. Ainsi, la construction est-elle cette action d’édifier, de constituer la structure de fonctionnement, soit de la société, soit de la pensée sans oublier leurs dérivées. Il faut une architectonique de bâtiment, de société et d’organisation qui consolidera la vie sociétale des hommes. Quant à la reconstruction, elle est une action de reconstituer, de rétablir dans sa forme, dans son état d’origine, en réalité ou par la pensée quelque chose qui a disparu.
C’est ainsi que l’on reconstruit une ville détruite par la guerre, une pensée ou un système de pensée. La reconstruction, cette construction par défaut, n’intervient que lorsque les acteurs ne s’accordent plus sur ce qui les unissait. Ce qui importe maintenant, c’est favoriser de nouvelles perspectives en vue de consolider l’acquis en l’améliorant. De toutes les façons, il faut reconstruire ce qui est détruit en Afrique depuis les premiers contacts avec l’extérieur jusqu’à nos jours. Cette atmosphère de construction-reconstruction suscite des préoccupations suivantes : Quelle option de reconstruction convient-elle au continent africain ? L’Africain a-t-il des aptitudes d’un constructeur et/ou reconstructeur ?
Certes, le continent africain a un réel souci d’asseoir un processus de reconstruction post-conflit qui tienne vraiment la route, mais son dévouement pour sa reconstruction va susciter des interrogations suivantes : Les indications à la mondialisation et à la globalisation tant prônées sont-elles favorables à l’Afrique ? La reconstruction n’est-elle pas une possibilité offerte à l’Afrique en vue de sa réelle effectuation ? Quelle est la contribution de Jürgen Habermas dans une affaire africaine de reconstruction post-conflit ?
Ces questionnements alimenteront notre participation au processus de reconstruction post-conflit de ce continent. Il s’agit d’accompagner la reconstruction post-conflit en faisant appel au philosophe de Düsseldorf, précisément à ses modèles théoriques culminant dans l’agir communicationnel et dans l’éthique de la discussion.
I – DES CONFLITS EN AFRIQUE : APPROCHE EXPLICATIVE ET DIALECTIQUE
Du latin conflictus, dérivé de confligo, le conflit signifie heurter, se heurter, entrer rudement ou maladroitement en contact avec l’autre, rencontrer un obstacle dans notre relation avec l’autre. Ainsi, le conflit peut-il être considéré comme un « rapport de deux pouvoirs ou de deux principes dont les applications exigent dans un même objet des déterminations contradictoires »1. En effet, le conflit exprime sans ambages une atmosphère d’antagonisme entre des principes, des nations, des tendances ou des devoirs. Deux positions opposées entrent en conflit, établissent un état de dissensus et poussent à des prises de positions rigides contradictoirement inflexibles. Cette situation se rencontre en Afrique qui est entrée en conflit avec l’Occident, puis avec elle-même (entre les nations et à l’intérieur des États jusqu’à nous).
I-1 : L’AFRIQUE DANS UN SOMBRE PROCESSUS D’HUMANISATION IMPOSÉ
La sombre histoire d’humanisation de l’Afrique a commencé par le dépérissement de sa population et de ses ressources culturelles (la traite négrière). « Durant les trois siècles suivant, l’Afrique est « saignée à blanc » par des négriers Européens. Entre vingt et cent millions (selon les sources) de noirs sont arrachés au continent et dispersés à travers les Amériques. Nul ne peut encore mesurer aujourd’hui l’impact réel qu’a eu cette véritable saignée humaine sur l’avenir du continent africain »2. La traite négrière a été une source de dépérissement culturel et de transfert de populations africaines vers les Amériques. Ce qui a ralenti en partie son processus de développement et sa capacité de construction puisqu’elle va subir la marchandisation de ses enfants en accompagnant, malgré elle, le développement de l’Europe et des Amériques.
La traite négrière n’a fait que s’inscrire dans cette expansion du capital « spécialement dans le monde de l’entreprise, dans le monde des affaires, comme on dit, y compris avec le redoutable double sens que ce mot d’« affaires » a pris dans la dernière période »3. Ce qui sous-entend que le capitalisme favorise un monde où « le bien (au sens moral du terme) et les biens (au sens économique) ne font pas toujours bon ménage »4. Ici, les rapports interhumains se constituent en des rapports moyens-fins. Il s’agit de se servir de l’autre (l’Africain) en vue de sa fin (l’Européen). La traite négrière présente le visage hideux du système capitaliste qui ne tire sa substance nutritive que de l’exploitation de l’homme par l’homme, de la violence, du conflit. Cette situation favorise la préoccupation suivante : Le capitalisme est-il moral ?
« Prétendre que le capitalisme est moral, ou même vouloir qu’il le soit, ce serait prétendre que l’ordre n°1 (l’ordre économico-techno-scientifique) est intrinsèquement soumis à l’ordre n°3 (l’ordre de la
morale), ce qui me paraît exclu par leur type respectif de structuration interne. Le possible et l’impossible, le possiblement vrai et le certainement faux, n’ont que faire du bien et du mal »1.
À vrai dire, la traite négrière reste la face visible de l’iceberg dont la base s’élargira tout en se renforçant depuis les premières tentatives d’expansion du capital en passant par la colonisation jusqu’à la civilisation scientificisée.
Quant à la colonisation, elle vient assombrir cette situation peu reluisante de l’Afrique en rendant l’Europe de plus en plus puissante. Cette suprématie maritime et commerciale est révélée par Marx en ces termes : « La colonisation des pays récemment découverts apporta à la lutte commerciale des nations les unes contre les autres un aliment nouveau et par conséquent une acuité et une extension plus grande »2. Pour lui, « la nation qui avait la suprématie dans le commerce maritime et la puissance coloniale s’assura aussi naturellement la plus grande extension quantitative et qualitative de la manufacture »3. Il ressort qu’avec la colonisation, l’Europe va dynamiser ses activités maritimes infrastructurelles et commerciales. Quant à l’Afrique, elle va présenter des indications de développement au point mort.
L’Afrique, cette inépuisable source d’approvisionnement en matières premières agricoles, minéralières et autres de la métropole, va vendre, sans vraiment rien bénéficier du fruit des matières premières dont elle dispose à profusion. Et, les quelques bras valides et les cultures qui sont restés après le passage de l’ouragan « Traite négrière » vont connaître la destructrice fureur de l’ouragan
« Colonisation » et ce, au détriment de cette partie du globe terrestre. Et jusqu’ici, les Africains connaissent un processus de construction qui leur vient de l’extérieur. Qu’en est-il à l’ère des indépendances ?
I-2: DES INDÉPENDANCES AUX NOUVELLES MODES DE RÉALISATION DES AFRICAINS : L’AFRIQUE DANS UN PROCESSUS D’HUMANISATION ACQUIS ET MAL « NÉGOCIÉ »
À l’ère des indépendances (de principe et non de fait), certes, les Africains prennent le contrôle de leurs pays, mais le poids de la métropole demeure fort comme une épée de Damoclès suspendue sur l’évolution de ces nouveaux États, qui avancent selon les prescriptions occidentales. C’est dans cette optique que l’on parle de transfert de technologie, d’ajustement structurel, de règne de technocrates (africains) en vue de sauver le continent, de conditions établies par la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (F.M.I.). La posologie de développement de l’Afrique lui vient toujours de l’extérieur (la capacité réflexive, la matière, la forme et la manière). Aussi, est-elle gangrénée par la « politique africaine de compromis avec des gouvernements qui ne consacrent pas l’argent au développement, mais pour s’installer durablement au pouvoir »4.
Cette atmosphère de couper-coller technique et technologique, culturel, social qui politiquement est loin d’être neutre, présente l’Afrique comme un enfant que l’on accompagne sans être accompagné véritablement. Comme si l’on se trouvait sur une tabula rasa alors que la réalité est autre. En Afrique, « s’y trouvaient déjà des groupes humains organisant, à leur manière et selon les ressources qui leur sont offertes, leur relation à la terre, à cela qui enfante, recueille, porte et sauvegarde »5. L’Afrique reste le lieu d’évolution d’une autre catégorie (couleur, vie, histoire, société) d’espèce humaine. L’on ne saurait la développer en omettant ces réalités qui s’affichent dans toute leur évidence. Aussi, est-il une mode (de bonne ou de mauvaise intention) de nos jours que chaque pays africain évolue en ayant dans ses jambes une rébellion. Cette situation de à-chacun-sa-rébellion afin de se faire entendre et d’entendre, engage chaque pays africain, au consensus sous perfusion.
Entre temps, l’ère des indépendances a été foncièrement animée par la politique du parti unique alimentée par le culte de la personnalité, la gabegie, la démagogie et l’arbitraire …. Quant à l’ère du multipartisme, elle va présenter des réalités démocratiques moins dynamiques. Toutefois, l’Afrique continue de mal s’illustrer dans la gestion des affaires publiques de l’État.
« D’une manière générale, les États du tiers monde sont mal gouvernés. Non seulement le fonctionnement d’une démocratie authentique y est difficile, mais ils ne sont pas parvenus à mettre en place des procédures de substitution qui auraient permis un minimum de contrôle sur les gouvernants. La seule sanction de l’échec est le coup d’État militaire, qui aboutit au remplacement du pouvoir légitime mais incapable par un pouvoir illégitime et généralement tout aussi incompétent. D’où, partout ou presque, le gaspillage, la corruption, et très souvent la violation des droits essentiels de la personne humaine »1.
En plus de la corruption, ce « système institutionnalisé indispensable à la survie »2 d’une certaine économie fonctionnant sur la base de la fraude, se chargeant de produire « ses propres codes, qui tendrait à se substituer aux codes officiels avec l’établissement de l’État »3, la violence, celle inhérente au capitalisme, animera un processus d’humanisation à reculons des Africains. Et, cette violence, de plus en plus observée dans les sociétés africaines, est le signe caractéristique que ces dernières « ont perdu le sens des valeurs »4. Il semble que l’Africain ignore le connaître et le savoir alors que, pour Harris Memel- Fotê, connaître et savoir, en tant que dimensions structurelles de toute vie individuelle et toute gestion collective de la société, supposent des institutions de formation des pratiques discursives et une activité sociale d’appropriation intellectuelle du monde.
Cette atmosphère communicationnelle de reconstruction post-conflit est-elle favorable à ce continent sinistré ? Peut-on éviter la sanction de Sisyphe condamné à rouler perpétuellement le rocher qui, au sommet de la montagne, se retrouvera inéluctablement en bas ? L’Afrique est-elle condamnée à toujours se retrouver en bas ? A-t-elle la capacité de recourir à la tendance générale de la construction- reconstruction ? Les conditions sont-elles réunies en vue de sa reconstruction ? En somme, l’Afrique a-t- elle une chance de réussir à se construire, en termes de se reconstruire une fois pour tout ? Quelles ont été les tentatives en vue du développement-progrès de l’Afrique ?
II- DES TENTATIVES DE NORMALISATION
II-1 : LE CANCER DE L’AFRIQUE
L’Afrique présente un sombre tableau de sous-développement dont les indications sont la complaisance, le refus de développer et de se développer, l’engourdissement dans la tradition, dans un passé glorieux… Nous comprenons cette nostalgie du passé, d’une Afrique des claires de lunes, des comptes de fées, etc., alors que la réalité s’affiche à crever les yeux.
L’Afrique est soumise et malade « des théories de la maladie qui l’enveloppent dans leurs discours; discours dont la puissance heuristique ou curative restent périphériques au corps du grand malade qui s’ignore »5. Ignorant sa maladie et la gravité de son état, elle veut s’exprimer, dans le jeu de développement-progrès, à la même vitesse que les autres continents. Elle se lance dans cette dynamique de mondialisation et de globalisation alors qu’elle a un cancer qui la ronge et continue de la ronger sur la voie de son développement, de son progrès. Ainsi, l’Afrique s’arrache-t-elle des plumes en embrayant sur
sa machine de développement-progrès qui ne peut atteindre la vitesse de croisière. « L’Afrique en panne ne devient pensable qu’en rapport avec la théorie de la panne; l’Afrique vendrediste est une Afrique rebaptisée par Robinson; l’Afrique en crise renvoie à une théorie de la crise, l’Afrique naufragée chavire d’une théorie de la navigation dont les Afro-pessimistes sont des capitaines en ce sens qu’ils tiennent le cap d’une mise en accusation qui se veut radicale »1.
Il s’ensuit que l’Afrique est « une grande gaspilleuse de temps, d’argent, de talents, d’énergie »2. Pour Kabou, « l’Afrique vit psychologiquement au Moyen-âge »3. Et, elle est incapable d’appliquer cette posologie stimulatrice de son élan de développement-progrès en vue de ne pas subir l’influence de la tradition, de sa tradition, de ses habitudes culturelles qui semblent lui imposer continuellement un comportement moyenâgeux.
Aussi longtemps que l’Afrique résout les situations qui se présentent à elle en les rapportant à une théorie donnée, téléologique, elle sombrera dans un état conflictuel suivi d’un processus de reconstruction. Ce qui l’engagera dans un état de perpétuelle reconstruction. Ici, la tradition, « ce qui reste : […] le résidu sans les déchets, le toujours présent du passé, le toujours vivant des morts »4, doit permettre une effectuation africaine sur la voie de l’universalisation et de la discussion. À vrai dire, « la société dans son mouvement laisse des traces derrière elle (la tradition) et expulse des pratiques à côté et hors d’elle (l’exclusion). On s’est trop occupé de l’art africain comme trace en laissant l’expulsé de côté. Or, pour sauver l’expérience-vécue africaine, toutes les pratiques doivent être reconsidérées. Peut-être, par ces marges, par ces franges (elles ne sont pas exclusives !) trouvera-t-il le principe de renouvellement des sociétés africaines ! »5.
Il faut éviter la stigmatisation et la stagnation de la culture africaine et la consumation des arts africains. Il faut puiser dans le toujours-vivant-des-morts des repères et des repaires pour la génération future. Les Africains doivent communiquer. Même si les premiers contacts avec l’extérieur ont perturbé la communication6, celle-ci doit s’élargir dans le sens de la réflexivité. Il faut sortir du carcan de la coutume, cette habitude collective à tendance normative liée à une tradition. L’Africain doit surmonter cette seconde nature qui accentue, non seulement la faiblesse de la nature humaine en général, mais aussi celle de l’être africain en particulier. Il faut refuser toute spontanéité de l’esprit et regarder dans le rétroviseur du passé pour ne récupérer que les éléments de son universalisation, de la discussion.
Il est convenable de retenir que « lorsqu’une culture rencontre l’occident technicien, elle n’affronte pas seulement une autre culture mais encore l’autre de toute culture, autre chose que la culture »7. Sans doute, « la forme sous laquelle l’Occident apparaît aux autres cultures, lorsqu’il les rencontre aujourd’hui, est celle de cette infrastructure écrasante propre à la civilisation capitaliste mondialisée déterminée par la science et la technique »8. Cet absolu retour à une authenticité (au sens de de celui qui agit de lui-même) africaine ne saurait être possible à l’ère du progrès technique et de ses implications directes et/ou lointaines.
En tout cas, cette autre-de-toute-culture, en ayant un caractère cumulatif, donne des indications à suivre à toute culture qu’elle rencontre. C’est ainsi que la culture africaine ne saurait s’authentifier. Aussi, au lieu de promouvoir un véhicule spécifique d’accompagnement du processus d’universalisation et de discussion, les Africains recourent-ils à une langue. Alors que la langue naît, grandit, atteint son apogée et meurt. Il faut faire la promotion d’un langage qui constituerait l’ultime moyen permettant d’atteindre une réelle communication.
Il n’est point question de recourir à une langue spécifiquement africaine parce que ce projet est délicat et sa réussite demande beaucoup d’abnégation et de temps, ce qui manque aux Africains qui doivent embrasser absolument le processus de mondialisation et de globalisation. L’objectif de dispersement voulu par le Transcendant est atteint à la tour de Babel. Toute la planète étant peuplée, les sociétés humaines doivent emprunter la voie de leur effectuation. Ce qui sous-entend que la reconstruction post-conflit qui va se charger de satisfaire une dimension téléologique de l’Afrique occasionnera un autre état de dissensus.
Le continent africain, lieu d’expérimentation de toute sorte de théories de progrès et de développement venant de l’extérieur, détient le plus haut taux d’échecs dans son processus d’effectuation. Dans cette situation de à-chaque-situation-donnée-sa-théorie, l’Afrique s’engage dans une activité rationnelle qui vise un objectif précis. Elle cherche toujours à rendre compte de son adaptation à son milieu et de son organisation interne.
« [Cette téléologie]a pour objet les productions de la nature et leur cause; et, bien qu’elle se réfère à cette cause comme à un fondement situé hors de la nature et au-delà d’elle (un auteur divin), elle agit cependant ainsi, non pour la faculté de juger déterminante, mais seulement pour la faculté de juger réfléchissante dans l’observation de la nature (en vue de guider l’appréciation des choses, dans le monde, par une telle Idée conforme à l’entendement humain et intervenant comme principe régulateur) »1.
L’Afrique opte pour une faculté de juger téléologique réfléchissante subsumant les objets de la nature sous le concept de finalité et semble considérer son monde comme un système de rapports entre les moyens et les fins.
Opter pour une théorie spécifique en réponse à une situation donnée, c’est s’exposer à une fréquence d’échecs puisque la description de la nature s’établit suivant un fil conducteur particulier, une activité rationnelle par rapport à une fin. Alors que « ce n’est pas la culture qui fait l’homme. L’homme en a besoin, bien sûr, sortant du règne de la nature. C’est la conscience qui distingue l’homme de l’animal. C’est encore la conscience qui lui évite d’être victime de sa culture quand les choses changent et les habitudes traditionnelles ne sont plus appropriées à faire face à la réalité nouvelle »2. L’Africain doit savoir prendre congé d’une culture à l’africaine, de la conceptualisation de cette dernière et de la focalisation de sa réussite sur un passé aussi glorieux fût-il. Le monde évolue, l’être humain se dynamise continuellement. L’Africain ne saurait rester en marge de cette dynamique sociétale.
Face à de nombreux déboires (pratiquement dans tous les domaines) qu’enregistre l’Afrique, l’on est en mesure de se demander si cette dernière a les moyens pour parvenir à une éducation au développement-progrès ? Quel est l’apport des intellectuels africains dans le processus de construction de l’Afrique ?
II-2 : L’AFRIQUE ET SES « BRILLANTS » INTELLECTUELS DANS UN PROCESSUS PARTICULIER DE SON DÉVELOPPEMENT-PROGRÈS
La situation africaine laisse croire qu’il n’y a pas d’intelligence capable de prendre en main les rênes de ce continent qui présente un état agonisant. Chaque pays africain est infecté par le virus du sous-développement qui ne fait que laisser tout le monde dans un embarras et un extraordinaire état d’étonnement. Comment un continent dont les fils sont allés à l’école des blancs et se sont frottés aux fils et aux actuels dirigeants des pays dits développés connaît un état de délabrement aussi avancé ? N’existe-t-il pas d’intellectuels en Afrique subsaharienne ? Avec les Africains, l’intellectuel semble prendre un autre sens, une nouvelle orientation comme si quelque chose leur manquait dans leur processus de réalisation intellectuelle.
Du latin intellectualis, l’intellectuel se rapporte à l’intelligence et est l’être humain dont l’intelligibilité détermine la manifestation au plus haut degré de l’esprit, de son esprit. En se servant des fonctions mentales ayant pour seul et ultime objet la connaissance rationnelle, l’intellectuel privilégie la pensée conceptuelle et discursive par rapport à ses ancrages concrets – action, affectivité, relations à autrui et au réel. Quelle que soit la contrée, aussi reculée soit-elle, l’intellectuel est capable de s’effectuer totalement.
Ici, il va se poser le problème de l’appellation des intellectuels africains puisque des indications nous révèlent qu’au lieu de mener à bien le navire Afrique, ils se constituent en de naufrageurs de continent. Les Africains ont-ils un goût prononcé (ou excessif) pour les choses de l’intelligence, de l’esprit au point d’accompagner le développement de leur continent ? Avec l’Afrique, parle-t-on d’intellectuels ou de lettrés ?
Il faut établir une nette différence entre l’intellectuel et le lettré en vue de comprendre le contraste de l’Afrique et ses enfants qui ont fait « l’école des blancs ». Du latin litteratus, le lettré est celui qui a des lettres, de la culture, du savoir. Tous ceux qui sont allés à « l’école occidentale » et qui ont emmagasiné des diplômes, une érudition avancée, peuvent être qualifiés de lettrés. Quant à l’intellectuel, il fait usage de l’intelligence en accompagnant rationnellement le processus de développement de son continent.
Retenons que l’histoire du terme intellectuel renvoie à « l’affaire Dreyfus » en France en 1898. Pour Habermas, « Anatole France appelle « intellectuel » l’homme cultivé qui agit « sans mandat politique », en se servant des moyens propres à son métier, dans un contexte étranger à ce dernier, et ce dans l’intérêt des affaires publiques – précisément dans l’espace public politique »1. En nous référant au monde allemand, c’est avec Henri Heine, précisément en 1848, que le terme intellectuel va s’imposer progressivement comme principe de la libre expression de l’opinion. « Accoucheur virtuel d’un espace public politique qui naîtra de l’espace public littéraire, l’intellectuel s’annonce par l’ombre qu’il projette devant lui »2. Marginalisé, comme l’a été Heine, l’intellectuel agit sous l’effet de l’amour de sa patrie qui est une blessure qu’il cherche à dissimuler à ses lecteurs.
Quant au lettré, il opte pour sa culture, le savoir en vue d’impressionner, de montrer qu’il a la situation en main, qu’il a la capacité de déterminer le genre de développement qui convient à son continent. Le lettré semble entretenir une atmosphère de lettres, de rêves qui ne répond pas toujours aux aspirations du moment. Dans le cas échéant, le sous-développement de l’Afrique est dû aux lettrés, ces hommes d’érudition qui pensent faire ce qui convient à leur continent selon les œuvres qu’ils ont parcourues, selon leur inclination littéraire.
À vrai dire, « il n’y a aucune différence de mentalité entre les intellectuels africains et les masses (…). Tout se passe, en effet, comme si l’intellectuel africain avait honte d’en savoir plus que les masses analphabètes, et les investissait d’un savoir supérieur pour mieux revendiquer une culture populaire
dévalorisée par le colonisateur, et se laver ainsi du péché de la toubabisation »1. L’intellectuel africain a tué en lui cette capacité de penser et de prendre conscience de son rôle dans l’évolution de son continent en optant pour un lettrisme creux ne favorisant aucune prise de conscience. Alors que la prise de conscience est « le moteur de la pensée sous toutes ses formes »2.
Comment peut-on et/ou doit-on comprendre ces rapports de coopération signés avec la métropole reconduisant la colonisation de ces pays sous une autre forme ? Comment des pays, n’ayant aucune assise économique véritable, peuvent-ils procéder à la privatisation de ses entreprises dites entreprises d’État ? Comment les Africains cherchent-ils la solution à leur situation en attendant que l’Occident leur apporte la solution comme s’ils manquaient de capacités réflexives ? Comment des gens doués d’un sens élevé de la conscience, de la responsabilité peuvent-ils bouffer la récolte et la semence destinées à l’élan économique de leurs pays alors que la théorie de la main tendue leur réserve de se plier irrévocablement aux exigences de celui qui donne ? Comment l’Afrique peut-elle s’effectuer sous le coup de la théorie de la main tendue ? Comment faut-il en sortir ?
Il s’agit de se donner, croyons avoir trouvé, non seulement les capacités infrastructurelles de développement, mais aussi les capacités superstructurelles de progrès. Le progrès technique doit fournir les moyens infrastructurels nécessaires à la satisfaction de la vie matérielle de l’Africain. Le progrès doit aider à créer les conditions d’un développement intellectuel, à partir des universités, des grandes écoles de formation professionnelle et autres possibilités d’évolution intellectuelles. Ce complexe développement- progrès doit créer un espace de réalisation de l’être africain. Habermas ne peut-il pas nous donner les moyens d’une véritable effectuation de l’Africain ?
III- HABERMAS ET SA THÉORIE DE L’ARGUMENTATION
L’Africain doit être capable d’actionner le moment de la discussion en vue de se mettre sur la voie de sa réelle effectuation. Il faut établir une symbiose entre la musique et les pas qui accompagnent cette danse. Disons qu’il est convenable de danser au son de la musique. Ainsi, l’Africain doit-il opter à la fois pour l’amour du langage et le langage de l’amour en accordant les violons et en parlant le même langage.
L’amour du langage permettra aux Africains de dépasser cette étape guerrière de la reconstruction et de trouver un moyen pacifique et pacifié d’expression. Ce sentiment profond d’attirance vers quelque chose ou quelqu’un doit se constituer en un véritable aimant qui doit toujours attirer les bornes opposées. Il faut un état de l’amour de soi au lieu de l’amour propre. C’est ce sentiment factice, qui naît dans la société et qui porte chaque individu à faire plus de cas de soi que de tout autre, qui convient à l’Africain.
Quant au langage de l’amour, il est favorable à la situation suivante : « Ce qu’on fait par amour s’accomplit toujours par-delà le bien et le mal »3. Il est question d’aller au-delà de l’interdit et de la contrainte puisque « ce que l’on fait par contrainte, on ne le fait pas par amour »4. « Ce qu’on fait par amour, on ne le fait pas par contrainte ni, donc, par devoir. […]. Quand l’amour est là, quand le désir est là, a-t-on besoin du devoir ? »5. L’amour du langage pratique le langage en tant qu’Eros6, Philia1 et Agapè2. Il s’agit de mettre le langage au centre de toutes les manifestations humaines les plus intimes.
Il est clair que « l’homme est tel qu’il ne se contente pas seulement de vivre, mais veut également comprendre la vie, lui trouver un sens. Le langage est une manifestation de ce besoin humain par excellence »3. Sa raison d’être se situe, non seulement dans la qualité de son effectuation langagière, mais aussi dans le langage lui-même en tant que marque de sa supériorité sur les autres êtres vivants. Il s’agit de contenir la raison dans ses espaces de légitimité à savoir produire des idéalisations qui sont liées aux fonctions du langage.
Contenir la raison dans ses espaces de légitimité « ne peut se faire que si on la découvre dans un usage qui, s’il doit être désormais détranscendantalisé, puisse, cependant, retrouver ce dont Kant investissait son usage transcendantal, c’est-à-dire dans la production d’idéalisations liées aux fonctions même du langage. C’est le langage en effet qui nous permet d’unir raison et expérience, sans que cela pour autant doive laisser le dernier mot à l’ontologie ou à l’empirisme »4. Habermas, en s’inspirant de Kant, va s’employer à reconstruire sa production d’idéalisations liées aux fonctions du langage. C’est pourquoi, l’idée selon laquelle la raison doit être contenue dans sa juridiction légitime est reprise. Ne se situant ni dans l’histoire, ni dans la nature, la raison devient le medium dans lequel la pensée se forme, se conforme et s’effectue, c’est-à-dire dans le langage, à la fois sphère de représentation et de communication.
Si l’importance du langage en vue de donner une ligne de conduite ne saurait être étrangère à l’espèce humaine en général et à l’Africain en particulier, il ressort que la pensée habermassienne de la communication a sa raison d’être dans l’effectuation de cette partie du globe terrestre en quête de moyens de construction-reconstruction. En clair, comment la théorie sociale de Habermas peut-elle s’appliquer au monde africain ?
III-1: QUE VAUT HABERMAS POUR L’AFRIQUE ?
Loin d’un cours de linguistique, nous voulons parler du langage comme ce qui participe à l’activité communicationnelle, ce qui est lié aux conditions de la communication. Le langage permet au locuteur de communiquer avec les autres membres de sa communauté linguistique. Et, c’est herméneutiquement que l’on va observer « le langage au travail, c’est-à-dire qu’il est utilisé par les participants pour accéder à la compréhension commune d’une chose, ou pour atteindre une même manière de voir »5.
L’Africain doit faire usage du langage d’abord, pour prendre en compte l’intention de son locuteur; ensuite, pour établir une relation interpersonnelle entre le locuteur et l’auditeur (sa communauté); enfin, pour proposer quelque chose d’existant dans son monde. Un effort d’explication de la signification d’une expression en vue d’établir une relation intralangagière réside dans « une expression donnée et la foule de toutes les explications possibles qui pourraient être faites dans la même langue »6.
Nous ne voulons promouvoir aucune langue africaine, ni rechercher un moyen africain pour s’entendre ou se faire entendre entre Africains. Une telle attitude favorisera le manque d’objectif premier permettant leur effectuation. Les Africains doivent avoir la même manière de voir et non chercher à africaniser leur moyen d’expression. Cet usage du langage est objectif, social et subjectif, c’est-à-dire se référer aux exigences de validité rapportant la vérité au monde objectif, la justesse normative au monde
social et la sincérité au monde subjectif. C’est ainsi que la vérité, la justesse normative et la sincérité constitueront les fondements d’une expression langagière africaine.
D’abord, l’Africain doit opter pour le langage de la vérité en rendant effectif ce qui est et ce qui doit être. Il s’agit de se donner les moyens d’une correspondance-adéquation de la chose et de la pensée de la chose et d’une révélation à la réalité humaine. Objectivement, l’Africain doit parler le langage de son rapport aux traditions, de ses actions politiques, administratives, militaires, sécuritaires (sécurité économique, étatique …) … Le rapport de l’Afrique avec elle-même et avec l’autre doit être objectif. Une théorie de l’objectivité voit le jour et accompagne l’éducation, la vie politique, l’administrative, le rapport à l’argent. Il faut asserter « quelque chose en fonction de la relation épistémique sujet-objet »1.
Ensuite, une socialisation des rapports entre les Africains doit déterminer la manière de s’exprimer, de se faire comprendre. Il faut être capable d’établir des relations interpersonnelles légitimes, c’est-à-dire comprendre la nécessité de ne pas voir l’autre comme un moyen en vue d’une fin mais sa capacité à s’exprimer devant un être rationnel. C’est rationnellement que les Africains se socialiseront. Tout le monde (intellectuel, politique, citoyen …) doit être sur le même pied, s’assurer de la qualité de la fondation en vue de procéder à la reconstruction.
Loin d’insulter l’Africain en lui demandant de rationaliser ses rapports sociaux, il est question de savoir qu’il ne peut y avoir de consensus réel à l’ère de la reconstruction post-conflit que si les hommes prennent conscience qu’ils sont tous des acteurs rationnels engagés dans le processus de reconstruction post-conflit. Il faut une théorie de l’éducation en construisant un échafaudage solide dans la reconstruction de l’édifice et en se référant « à une relation normative sujet-sujet »2.
Enfin, c’est subjectivement que chaque Africain privilégiera son rapport à l’autre en faisant partager son expérience subjective dans le processus de reconstruction. Loin d’établir une quelconque théorie en rapport à une situation de crise donnée, l’Afrique respectera cette règle d’or qui stipule que
« tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux »3. Il faut une expression subjective permettant l’établissement d’une relation intersubjective authentique. Il est question de glisser vers une subjectivation de l’intersubjectivité « en produisant des propositions expressives renvoyant à nous-mêmes »4.
En somme, le langage favorise l’établissement effectif du monde global en tant qu’objet nécessaire d’une représentation socio-anthropologique recourant aux images du monde. Ce qui revient à s’intéresser « aux systèmes culturels d’interprétations, ou images du monde, qui reflètent le savoir d’arrière-fond des groupes sociaux, et assurent une liaison cohérente dans la multiplicité de leurs orientations d’action »5.
La discussion, face réflexive de la communication, intervient lorsque les acteurs ne trouvent plus de consensus dans tout ce qui devrait les unir. Il est établi une éthique de la discussion, c’est-à-dire un règlement intérieur de la discussion pour mettre en place des balises d’action de l’homme. Dans le cas de la reconstruction post-conflit, nous pouvons soutenir que les acteurs connaissent déjà un moment de dissensus dû au conflit et sont engagés dans la phase réflexive de la communication puisqu’il est question de reconstruction.
L’éthique de la discussion de Habermas doit être vue comme le remède de construction- reconstruction sur la voie de la modernité. Et, l’Afrique se doit d’aller à l’école de Habermas. Il s’agit de dépasser les théories de la résolution spontanée des problèmes africains pour leur résolution durable sur la base de la discussion. C’est dialogiquement que l’on doit révéler la discussion. Toutefois, la discussion
est distincte du dialogue (Wellmer) ou de la conversation (Rorty). Sachons que le dialogue ou la conversation n’imposent en aucun cas un recours à l’argumentation puisqu’ils sont incapables de définir un cadre de justification. La discussion, au sens habermassien du terme, renvoie au débat argumentatif.
« Le programme qui propose de fonder en raison l’éthique de la discussion exige bien de :
- introduire un principe d’universalisation faisant fonction de règle argumentative;
- identifier les présuppositions pragmatiques de l’argumentation en général, qui sont incontournables et dont le contenu est normatif;
- présenter explicitement ce contenu normatif en lui donnant, par exemple, la forme des règles de la discussion, et;
- démontrer qu’il existe entre (3) et (1) un rapport d’implication matérielle en relation avec l’idée de justification des normes »1.
L’éthique de la discussion favorise la procédure consistant à honorer par la discussion des exigences normatives de validité. Quant à la théorie de la discussion, elle doit s’appuyer sur une éthique de la discussion : Le principe d’universalisation, principe « U », et le principe de la discussion, principe
« D » en sont l’aiguillon. « « U » se déduit des règles et des présupposés de l’argumentation lorsqu’une discussion a pour objet une norme; « D » est plus restreint, et ne ressortit pas à la logique de l’argumentation, il fixe le cadre formel d’élaboration d’une théorie morale fondée en raison »2. « U » introduit l’argumentation dans les discussions pratiques en se constituant en modèle de l’équilibre réflexif au sens rawlsien du terme.
Il s’agit d’une « reconstruction des intuitions quotidiennes qui sous-tendent l’évaluation des conflits moraux qui adviennent dans l’action »3. « U » est la règle d’argumentation permettant une entente mutuelle dans les discussions pratiques. Ici, les problèmes doivent connaître un point équitable de règlement en fonction de l’intérêt de toutes les personnes concernées. Le principe « U » est le principe- passerelle donnant accès à la discussion.
Quant au second, le principe « D », il se donne une valeur universelle qui outrepasserait la perspective d’une culture déterminée. En effet, le principe de discussion repose sur la preuve pragmatico- transcendantale qui va établir l’existence des présuppositions universelles de l’argumentation. « D » nous permet de prendre conscience de ce que le premier ne s’engage que sur la voie de l’expression du contenu normatif d’un procédé par lequel la volonté se forme dans la discussion. L’Africain doit opter pour l’éthique de la discussion en vue d’établir les balises d’une vie à la fois juste et bonne dans tous les domaines d’activité de sa vie. Cette odyssée ne connaît une bonne fin qu’en se solidifiant dans la théorie de l’argumentation.
L’argumentation est considérée comme le processus, la procédure et la production d’éléments
« par lesquels la prétention à la validité qu’un locuteur attache à un acte de parole (de langage ou de discours) peut être justifiée, ou contestée et/ou réfutée par un interlocuteur »4. Avec l’argumentation, une relative interaction entre interlocuteurs est établie et permet aux êtres rationnels de se comprendre, de s’entendre et de se faire entendre.
En tant que processus, l’argumentation est « conçue comme une poursuite par des moyens réflexifs de l’activité orientée vers l’intercompréhension »5. Il est question d’établir le cordon ombilical
reliant les sujets rationnels pour se comprendre. Ainsi, l’intercompréhension est-elle favorable à une subjectivation de l’intersubjectivité. Ce sont toutes les personnes concernées qui, à partir de la discussion (activité orientée vers l’intercompréhension), sont engagées dans la reconstitution sociétale. Considérer l’argumentation comme procédure, c’est constituer une forme procédurale de l’interaction réglée spécifiquement. La procédure permet à l’argumentation d’aller en avant. Il s’agit de réussir une opération argumentative complexe.
Enfin, l’argumentation, production d’arguments pertinents, convaincants, est « la forme logique de la discussion, non sous l’aspect du contenu des énoncés (qui suppose une théorie de la signification), mais sous l’aspect de l’engagement pragmatique que supposent les actes de langage (ou peut-être plus justement de discours) »1. Il s’agit de réaliser pragmatiquement les arguments selon la logique de la discussion qui « requiert un cadre conceptuel permettant de prendre en compte le phénomène de contrainte non contraignant de l’argument meilleur »2, celui qui alimentera au plus haut niveau les relations interpersonnelles. La théorie de l’argumentation ou logique informelle, en tant que théorie de la raison en acte, ne doit pas être confondue à la discussion. La première se charge de livrer les conditions de possibilité en vue de s’intégrer à la pragmatique universelle. Quant à la seconde, elle opte pour la thématisation de la normativité et découle de la pragmatique universelle.
La théorie de la reconstruction post-conflit est un processus, une procédure et une production
d’arguments meilleurs. C’est communicationnellement que les Africains arriveront à sortir de cette spirale de conflits. Sans doute, l’Africain devra-t-il naître dans un espace public dynamique qui, en fonctionnant politiquement, « n’a pas seulement besoin des garanties offertes par les institutions de l’État de droit, il dépend aussi du soutien de traditions culturelles, de modèles de socialisation, d’une culture politique propre à une population habituée à la liberté »3.
III-2: DE L’ESPACE PUBLIC EN AFRIQUE
L’Öffentlichkeit est un terme allemand n’ayant d’équivalence stricte ni en français ni en anglais. Primo, il désigne l’espace public. Secundo, il détermine une exigence démocratique fondamentale. Sans doute, l’Öffentlichkeit est-elle un espace démocratique de rationalisation et/ou un espace rationnel de démocratisation de l’homme et de son cadre de vie. Il est question de lui permettre d’être un citoyen.
« L’homme doit être citoyen pour être ce qu’il doit être, c’est-à-dire sujet raisonnable, homme au sens plein du terme »4. En tout cas, l’espace public prôné par Habermas est une révolution qui doit faire école en Afrique subsaharienne puisque c’est « dans le cadre de la sphère publique que les citoyens valeureux dont Aristote dresse le catalogue se confirment comme tels, et c’est d’elle qu’ils attendent d’être reconnus »5.
Habermas fait la promotion des sujets rationnels, valeureux dans un espace respectant le principe moral universel, universalisable à partir du contenu normatif des présuppositions pragmatiques de l’argumentation. En tout cas, « Habermas appelle « espace public », le lieu où les interprétations et les aspirations en question se manifestent et acquièrent consistance aux yeux de chacun, s’interpénètrent, entrent en synergie ou en conflit »6. Ainsi, le débat public se soucie-t-il de lier la validité des normes à la possibilité d’un accord justifié des acteurs rationnels. Sans doute, les normes garantissent-elles le rôle des sujets à l’argumentation. Le désir du dialogue, l’effort pour argumenter, la reconnaissance de la raison de
son interlocuteur animent le débat public. Loin d’une analyse sémantique des termes de public et de privé, l’Öffentlichkeit peut être considérée globalement comme un « espace public au sein duquel se forme l’opinion publique »1.
L’espace public possède une fonction stabilisatrice permettant la gestion des affaires publiques sur la base de la participation qui requiert « une représentation égale de toutes les personnes concernées »2. En effet, la participation « doit assurer que tous les intérêts et toutes les orientations axiologiques peuvent être défendus dans la négociation de façon à disposer du même poids »3. Il ressort que l’espace public donne de l’assurance aux citoyens en vue de s’exprimer sur la base de la légalité, de la responsabilité et de la prise de conscience de la nécessaire préservation de l’intérêt de la communauté et de celui de chaque citoyen.
L’espace public ne fait que légitimer la capacité de toute personne à participer à la gestion des affaires publiques. Ce qui sous-entend que l’espace public détient les moyens de sa légitimation mettant les hommes sur le même pied. Aussi, permet-il à chaque sujet rationnel de s’assurer axiologiquement sur la base de l’égalité tout en préservant l’intérêt de tous. Quels que soient les domaines d’activité, quelle que soit la culture, quelles que soient les habitudes traditionnelles, l’espace public doit être animé par le souci de liberté et la quête d’un modèle humain de socialisation. Il est question de trouver « la manière dont [la] société peut acquérir une emprise sur soi, se médiatiser elle-même par la conscience et la volonté, faire émerger un pouvoir sur elle-même qui soit à la fois radicalement immanent et rationnel »4.
Il s’ensuit que l’Öffentlichkeit, cette exigence démocratique fondamentale, favorise la puissance d’agir des agents sociaux, des sujets rationnels qui se constituent en des acteurs de l’histoire, de leur histoire. Cette sphère publique permettra l’instauration de la politique comme une activité discursive articulant l’autonomie privée et l’autonomie publique, la sphère des intérêts privés et les cadres de l’État dans un cadre consensuel promouvant l’humanisation des hommes. Il s’agit d’offrir un espace d’expression à l’ »opinion publique » qui devient un pôle de résistance à la domination, à la déshumanisation.
Aussi, avec l’éclosion de l’État social, la sphère publique favorise-t-elle le rattrapage démocratique radical suivi d’une reconversion de l’interpénétration fonctionnelle de l’État et de la société où tout semble se dérouler quasiment au-dessus des participants. La conception habermassienne de l’Öffentlichkeit s’enracine dans la vision marxiste d’une humanité accédant à la maturité, à l’émancipation en se réappropriant cette puissance d’agir, sa puissance de faire l’histoire, de faire son histoire dans un espace public favorable à l’intercompréhension, à l’intersubjectivité. Ainsi, l’Afrique doit-elle se saisir de l’espace public prôné par Habermas en vue de stimuler la naissance d’un Africain nouveau.
IV – L’AFRICAIN NOUVEAU
L’Africain nouveau, « celui qui voit l’abîme, mais avec des yeux d’aigles, qui avec des serres d’aigle se saisit de l’abîme »5, ne vise que ce qui est « grand »6 en ayant le « courage d’ermite et d’aigle »7 d’aigle »7 de s’en sortir en garantissant par la même occasion la plénitude de l’être et l’initiative créatrice. Il Il sait faire la différence entre ce qu’il a et ce qu’il est. « Tout se ramène à la distinction entre ce qu’on a et
ce qu’on est »1. Le monde de l’avoir étant subordonné à celui de l’être, « l’homme de l’avoir ne s’intéresse pas à l’amour véritable »2.
Il faut sortir de la « pellicularité de l’être » transparaissant dans les relations humaines lorsque, par exemple, une personne est présentée en ces termes : « Je vous présente Monsieur X, le cousin du ministre ». Cette déficience ontologique, faisant de l’Africain un être dédoublé, celui qui, désapprouvant quelque chose publiquement, recourt à cette chose en cachette, doit être bannie pour la promotion de l’homme de l’excellence, « celui qui ne se contente pas de vaines paroles mais qui agit immédiatement sa parole à la fois intime et publique, laissant le soin à d’autres d’expliciter cette parole déjà inscrite par lui dans ses œuvres »3. L’homme de l’excellence ne se préoccupe que de son salut et de celui des autres. Ce qui importe ici, « c’est le développement de l’homme individuel tel que celui-ci voit ses capacités spirituelles et matérielles l’élever au-dessus de la médiocrité et le porter sur les cimes du divin »4.
Aussi, l’Africain nouveau ne saurait-il être celui de l’authenticité traditionnelle, l’être circonstanciel qui n’actionne son être que lorsqu’une situation se présente à lui. Il doit user du langage pour se faire comprendre, non seulement des Africains, mais des autres. La discussion permettra la résolution pragmatique universelle du processus d’intercompréhension entre les acteurs rationnels. Et, la théorie de l’argumentation se chargera de consolider la validité de ses arguments jusqu’à promouvoir « le phénomène de contrainte non contraignante de l’argument meilleur »5. Cette force sans violence de l’argument meilleur lui permettra d’avoir un regard beaucoup plus aiguisé, beaucoup plus incisif sur les questions se rapportant au développement, au progrès, à la démocratie et à la reconstruction post-conflit. Son rapport avec la tradition doit stimuler la conquête de l’universel et de l’universalisable, du discutable et de la discussion.
Ainsi, la théorie idéaliste de l’apprentissage à la pêche viendra-t-elle en remplacement à la théorie de la main tendue. Et, cette éducation d’inspiration traditionnelle doit être universelle et favorable à la discussion. Quant à l’Administration, tout en s’universalisant, elle affichera sa promptitude à résoudre les préoccupations du citoyen. Elle doit profiter à tout citoyen. Avec l’Administration, la volonté de citoyenneté de chaque Africain est assurée.
Avec l’Africain nouveau, les États africains accorderont de la valeur à l’éducation en créant, non seulement les conditions d’une meilleure éducation, mais aussi en ayant recours aux meilleurs éducateurs. Ainsi, l’éducation, cheville ouvrière du processus de développement et de progrès de l’Afrique, accompagnera-t-elle ce continent dans la formation des élites. L’Afrique devient le « milieu où les artistes et les créateurs fourmillent, où on déniche une bibliothèque à chaque coin de rue, où […] les hommes seront beaucoup plus libres à l’égard de l’avoir, plus portés à s’élever vers les plus hautes sphères de la spiritualité et rivaliseront non point en réalisations matérielles, mais en performances de créativité »6.
Loin de parler des intellectuels, des lettrés, l’Africain se veut un intellectuel-lettré. Il s’agit de s’élever au-dessus des autres humains en prônant les valeurs et les normes universelles et de discussion dans le processus de reconstruction post-conflit. L’Africain nouveau doit être vertueux en établissant les conditions de son bien-être en communauté. Il ressort que le langage de la tradition, de l’Administration, de la sécurité, de la paix, de la conservation de soi constitue les maîtres mots de l’expression du continent. Ce schéma commençant par le langage (la théorie du langage) en passant par la discussion (la
théorie de la discussion) pour l’argumentation (la théorie de l’argumentation) est une vision qui alimentera toutes les activités individuelles, communautaires, étatiques, démocratiques.
La reconstruction post-conflit est une nouvelle possibilité offerte à l’Africain afin de naître de nouveau. Une occasion lui est donnée pour mettre fin à la spirale de conflits (conflits de tradition, de génération et bien d’autres). Ce qui sous-entend que l’Administration, le clergé, sans omettre la tradition, opteront pour leur universalisation sur la base de la discussion. Dans ces conditions, le langage de la discussion et de l’universalisation assurera une reconstruction post-conflit à la fois bonne et juste. L’Africain nouveau doit savoir s’universaliser, savoir discuter.
CONCLUSION
En définitive, l’Afrique subsaharienne a connu une triste histoire de son effectuation. Et, les tentatives d’une normalisation ont présenté un sombre tableau de son développement dont les indications sont et demeurent au point mort. C’est ainsi que nous optons pour la conception habermassienne du langage, de l’activité communicationnelle qui est l’activité capable de mettre ce continent sur les rails de sa manifestation. La communication, au sens strict, étant perturbée de l’extérieur par l’Occident et de l’intérieur par les Africains eux-mêmes, la reconstruction les engage dans la phase réflexive de l’activité communicationnelle. La phase d’universalisation et de discussion de l’Africain est ainsi engagée et connaît une phase de démocratisation dans tous les domaines d’activité.
Avec la discussion, l’Africain se constitue en un acteur rationnel dans le processus de reconstruction post-conflit. Ainsi, la contrainte non contraignante du meilleur argument permettra-t-elle une argumentation universelle et universalisable, discutable lorsqu’il est question de réfléchir sur l’action de l’Africain. Quel que soit le lieu où il se trouve, l’éducation à l’universalisation, à la discussion alimentera la vie sociétale de l’Africain, de l’Africain nouveau. Ici, le politique crée les conditions d’une expression sur la base de l’universel, de la discussion en animant universellement sa vie et la vie de la population dont il a la charge.
Le complexe développement-progrès doit être vulgarisé pour réaliser un meilleur processus de reconstruction en Afrique. En clair, les binômes développement et progrès, infrastructure et superstructure constituent des matériaux de reconstruction de cette partie du globe terrestre. Si l’Afrique veut marquer le monde et obtenir une place de choix dans le concert des nations, elle doit être capable de créer les conditions idéologiques de son effectuation.
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_______________________________________________________
1 LALANDE André, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, Paris, P.U.F/Quadrige, 1997, pp. 168-169.
2 KAKÉ Ibrahim Baba, « Au temps des grands empires africains » in La vie privée des hommes, Paris, Hachette, 1991, p. 12.
3 COMTE-SPONVILLE André, Le capitalisme est-il moral ?, Paris, Albin Michel, 2004, p. 14.
4 Ibidem.
5 COMTE-SPONVILLE André, op.cit., pp. 73-74.
6 MARX Karl, et ENGELS Friedrich, Texte sur le colonialisme, Moscou, Du Progrès, 1977, p. 9.
7 MARX Karl, et ENGELS Friedrich, Texte sur le colonialisme, Moscou, Du Progrès, 1977, p. 10.
8 DUMONT René, Démocratie pour l’Afrique, Paris, Seuil, 1991, p. 28.
9 DIBI Kouadio Augustin, L’Afrique et son autre : La différence libérée, Abidjan, Strateca Diffusion, 1994, p. 13.
10 CALVEZ Jean-Yves, Tiers monde, un monde dans le monde, Paris, Ouvrières, 1989, pp. 91-92.
11 ROCCA Jean-Louis, La corruption, Paris, Syros, 1993, p. 24.
12 SALAMA P. et VALIER J., Pauvreté et inégalité dans le tiers monde, Paris, La Découverte, 1994, p. 109,
13 SYLLA Lanciné, Anthropologie de la paix : De la contribution de l’Afrique à la culture de la paix, Abidjan, C.E.R.A.P., 2007,
- 289.
14 KONATÉ Yacouba, « Le temps des afro-pessimistes » in Temps et développement dans la pensée de l’Afrique subsaharienne, Amsterdam, Rodopi, 1998, pp. 239-250.
15 KONATÉ Yacouba, « Le temps des afro-pessimistes » in Temps et développement dans la pensée de l’Afrique subsaharienne, Amsterdam, Rodopi, 1998, pp. 239-250.
16 KABOU Axelle, Et si l’Afrique refusait le développement ?, Paris, L’Harmattan, 1991, p. 24.
17 Idem, p. 139.
18 COMTE-SPONVILLE André, Une éducation philosophique et autres articles, Paris, P.U.F., 1998, p. 58.
19 BIDIMA Jean-Godefroy., L’art négro-africain, Paris, P.U.F., 1997, p. 8.
20 Habermas parle de perturbation de la communication lorsque les acteurs ne s’accordent plus sur les éléments qui constituent les piliers de leur vie en société. Ce qui veut dire que nous passons d’une communication au sens large à une communication au sens strict qui se rapporte à la discussion.
21 DIAKITÉ Sidiki, Les techniques de pointe et l’Afrique. Préparer l’an 2001, Abidjan, N.E.A., 1988, p. 23.
22 HABERMAS Jürgen, Une période de transitions. Écrits politiques 1998-2003, trad.fr Christian Bouchindhomme, Paris, Fayard, 2005, p. 332.
23 KANT Emmanuel, Critique de la faculté de juger, trad.fr Alain Renaut, Paris, Aubier, 1995, p. 413.
24 HENGELBROCK Jürgen, « Temps et politique. Réflexions à partir de la notion aristotélicienne du temps opportun » in Temps et développement dans la pensée de l’Afrique subsaharienne, Amsterdam, Rodopi, 1998, pp. 43-53
25 HABERMAS Jürgen, Écrits politiques : culture, droit histoire, trad.fr Christian Bouchindhomme et Rainer Rochlitz, Paris, Flammarion 1990, p. 35.
26 Idem, p. 37.
27 KABOU Axelle, Et si l’Afrique refusait le développement, Paris, L’Harmattan, 1991, p. 126.
28 LALÈYÊ Issiaka Prosper, « Du temps comme dimension au temps comme condition de développement » in Temps et développement dans la pensée de l’Afrique subsaharienne, Amsterdam, Rodopi, 1998, pp. 251-255.
29 NIETZSCHE Friedrich, Par-delà le bien et le mal, trad.fr G. Bianquis, Paris, 10/18, 1979, p. 130.
30 KANT, Emmanuel, Doctrine de la vertu, trad.fr Alexis Philonenko, Paris, Vrin, 1979, p. 73.
31 COMTE-SPONVILLE André, Petit traité des grandes vertus, Paris, P.U.F, 2004, p. 293.
32 Du grec Erôs, Eros, fils de Poros (l’abondance) et de Pénia (la pauvreté), est le dieu de l’amour. Pour Platon, Eros est le guide de l’ascension de l’âme vers le beau. Opposé à Thanatos, pulsion de la mort, Eros est la pulsion de la vie.
33 Du verbe grec philein qui veut dire amour quel que soit l’objet de cet amour, le substantif philia désigne les rapports interpersonnels. L’on peut le désigner par l’amour entre mari et femme pour parler comme Aristote dans Éthique à Nicomaque.
34 Agapè désigne l’amour-charité en se rapportant à l’amour charnel. Nous pouvons soutenir sans nous tromper que l’Agapè est le guide de l’ascension du corps vers le beau.
35 SAVADOGO Mahamadé, La parole et la cité. Essais de philosophie politique, Paris, L’Harmattan, 2005, pp. 301-302.
36 HABERMAS Jürgen, Idéalisations et communication. Agir communicationnel et usage de la raison, trad.fr Christian Bouchindhomme, Paris, Fayard, 2006, p. 9.
37 HABERMAS Jürgen, Morale et communication. Conscience morale et activité communicationnelle, trad.fr Christian Bouchindhomme, Paris, Cerf, 1986, p. 45.
38 Ibidem.
39 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, Paris, Ellipses, 2002, p. 54.
40 Ibidem.
41 La Sainte Bible version Louis Segond, Matthieu 7 verset 12.
42 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, Paris, Ellipses, 2002, p. 54.
43 HABERMAS Jürgen, Théorie de l’agir communicationnel. Rationalité de l’agir et rationalisation de la société, trad.fr Jean-Marc Ferry, Paris, Fayard, 1987, p. 60.
44 HABERMAS Jürgen, Morale et communication. Conscience morale et activité communicationnelle, trad.fr Christian Bouchindhomme Paris, Cerf, 1986, p. 118.
45 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, Paris, Ellipses, 2002, p. 45.
46 HABERMAS Jürgen, Théorie de l’agir communicationnel. Rationalité de l’agir et rationalisation de la société, trad.fr Jean-Marc Ferry, Paris, Fayard, 1987, p. 131.
47 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, p. 20.
48 HABERMAS Jürgen, Théorie de l’agir communicationnel. Rationalité de l’agir et rationalisation de la société, p. 41.
49 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, Paris, Ellipses, 2002, p. 20.
50 HABERMAS Jürgen, Théorie de l’agir communicationnel. Rationalité de l’agir et rationalisation de la société, trad.fr Jean-Marc Ferry, Paris, Fayard, 1987, p. 44.
51 HABERMAS Jürgen, L’espace public. Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1978, p. XXXI, trad.fr Marc Buhot de Launay.
52 BOURGEOIS Bernard, Philosophie et droit de l’homme de Kant à Marx, Paris, P.U.F., 1990, pp. 26-27.
53 HABERMAS Jürgen, L’espace public. Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, p. 16.
54 HABER Stéphane, Jürgen Habermas. Une introduction, Paris, La Découverte, 2001, p. 32.
55 HOTTOIS Gilbert, De la renaissance à la postmodernité. Une histoire de la philosophie moderne et contemporaine, Bruxelles, De Boeck Université, 2002, p. 409.
56 HABERMAS Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes, trad.fr Rainer Rochlitz et Christian Bouchindhomme, Paris, Gallimard, 1997, p. 201.
57 HABERMAS Jürgen, op.cit., p. 201.
58 BOUCHINDHOMME Christian, Le vocabulaire de Habermas, Paris, Ellipses, 2002, p. 35.
59 NIETZSCHE Friedrich, Ainsi parlait Zarathoustra, trad.fr M. de Gandillac, Paris, Gallimard, 1971, p. 348.
60 Idem, p. 350.
61 Idem, p. 348.
62 MARCEL Gabriel, Être et avoir, Paris, Aubier-Montaigne, 1968, p. 195.
63 NJOH-MOUELLE Ébénézer, Développer la richesse humaine, Yaoundé, Clé, 1980, p. 22.
64 NJOH-MOUELLE Ébénézer, De la médiocrité à l’excellence. Essai sur la signification humaine du développement, Yaoundé, Clé, 1970, p. 143.
65 NJOH-MOUELLE Ébénézer, Développer la richesse humaine, Yaoundé, Clé, 1980, pp. 55 et 57.
66 HABERMAS Jürgen, Théorie de l’agir communicationnel. Rationalité de l’agir et rationalisation de la société, trad.fr Jean-Marc Ferry, Paris, Fayard, 1987, p. 44.
67 NJOH-MOUELLE Ébénézer, Développer la richesse humaine, Yaoundé, Clé, 1980, p. 71.


